jeudi 16 décembre 2010

L’effet « rendez-vous en terre inconnue »

Vivre dans une cabane.
Se construire une cabane en bois. Chasser pour se nourrir. Se divertir en lisant, en discutant, en regardant le ciel, en se baladant. Pas de télé, pas d’Internet, pas de radio, pas de presse, pas d’Autres ou si peu. N’avoir que le minimum vital. Ce que j’ai, j’en ai besoin pour vivre. Pour Noël, s’offrir un poème ou un dessin, s’offrir une promenade ou une déclaration. Ne rien acheter. Vivre avec deux pantalons et quelques pulls. Se moquer de l’assortiment. Avoir chaud et être bien. Ne faire que ce dont on a besoin. Vivre. Oublier les manipulations, celles des autres et les nôtres. Ne plus se mentir. Mettre l’argent à distance raisonnable. Se recentrer. Trouver.

C’est l’effet « rendez-vous en terre inconnue », l’effet « films de Nicolas Vanier », l’effet « Into the wild », l’effet « Une année à la campagne ». A chaque fois. Le même effet, à chaque fois. D’un coup, elle déteste les robes dans son placard et toutes ses paires de chaussures. Elle déteste le garage rempli d’objets dont on se sert à peine une fois par an. Elle déteste le congélateur rempli, les papiers rangés dans les chemises de couleurs. Elle déteste avoir envie d’un truc, elle déteste l’acheter, elle déteste l’envie de posséder et parvenir à posséder. Elle déteste les listes au Père-Noël et les envies de trucs et de machins. Elle déteste sa décoration, ses bibelots et sa poussière. Elle déteste son crédit et son assurance, son style pompeux. A chaque fois. Elle a envie du minimum et de l’essentiel. Avoir très peu et dire à son fils que ça suffit ainsi, que plus ça serait trop. Elle s’endort comme ça, avec ses doutes, avec ses impressions de faire fausse route. Elle se demande quel sens mais vraiment, quel sens ? Et le lendemain, elle commande sur Internet, elle achète et elle se perd. Elle va au Centre Commercial, elle remet de l’essence dans son réservoir, elle fait du business avec des gens qui aiment le business, elle se demande ce qu’elle fait, à quoi elle sert, pourquoi elle le fait, elle perd le fil. Elle se dit qu’elle est une adolescente un peu paumée, une quarantenaire en crise, une retraitée illuminée, une bobo perchée. Elle se convainc qu’elle fait ce qu’il faut faire.

Et sur son épaule, Nicolas Vanier, Sue Hubbel et Christopher McCandless s’endorment en silence. Il est fort quand même, ce Frédéric Lopez…

jeudi 9 décembre 2010

De l’importance du management

- Toi, le rose, tu as déjà servi hier soir, tu es de repos aujourd’hui.

- Les bleus, vous êtes trois. On va établir un roulement pour que ça ne soit pas toujours le même qui trime.

- Le violet, tu passes ton tour. Tiens-toi prêt pour le prochain coup.

- Bon, le tout petit là, je ne te sollicite pas souvent mais ça n’est pas parce que je ne t’aime pas. Je n’ai rien contre les petits mais c’est vrai que tu ne fais pas l’affaire pour le moment. Je te garde dans l’équipe quand même, ne t’inquiète pas.

- Pour la sortie d’aujourd’hui, j’emmène le bleu numéro 2. La prochaine fois, ça sera toi le violet, tiens-toi prêt et révise tes basiques.


Bon, j’ai une gestion très humaine des biberons… Toujours peur d’en vexer un. Imaginez que j’en braque un et qu’il décide de se boucher, de fuir, de dégager de mauvaises ondes... Le secret réside donc dans une bonne communication avec une répartition des tâches équitables et des temps de repos raisonnables. Pas de promotion spécifique mais la juste reconnaissance des qualités de chacun. A partir de là, on peut travailler sereinement, dans un vrai climat de confiance. C’est super important la confiance. Super important.

mercredi 8 décembre 2010

Le plus beau des cadeaux

Au début, cela ressemble à un petit rictus mal maîtrisé. Une sorte de grimace incontrôlée. Les petites lèvres qui se pincent et hop, on saute sur l’occasion pour décréter un sourire.

Parfois, c’est dans un demi-sommeil que les petites lèvres esquissent un sourire béat, signe d’un état de bien-être profond. Mais là encore, point de volonté pure et dure.

Mais ce matin. Ce matin, c’était différent. Les yeux dans les yeux, c’était un cadeau qui m’était adressé. Les muscles avaient été commandés. Il était voulu ce sourire. Il était pour moi. Il m’était offert.

Voilà, pour la première fois, mon bébé qui me sourit.

Chers amis, il n’y a rien, rien au monde, absolument rien au monde, de plus beau.

Voilà ce que nous sommes, nous, nous tous, jeunes parents ébahis devant leur enfant. Nous sommes accros. Nous décrochons, nous n’expliquons plus rien, nous fondons, nous glissons dans ce joli monde où les parents sont accros à leurs enfants. Et comme elle est douce cette addiction. Aimer à ce point…

Ce sourire, n’est-ce pas le plus beau des cadeaux ? Il était tellement beau, tellement bon que je vous le renvoie. Tenez, prenez-le, emportez-le avec vous, offrez-le à votre tour. Souriez, regardez ceux que vous aimez dans les yeux et souriez-leur. Offrez-leur ce cadeau, le plus beau des cadeaux.

Voilà, le Père-Noël est déjà passé pour moi. Il m’a offert le plus beau des sourires. Celui d’un fils pour sa maman. Celui-là, je le garde au fond de moi pour toujours. C’est mon trésor à moi.

mardi 7 décembre 2010

Imagination et folie… Quelle frontière ?*

Alors que je regardais par la fenêtre, l’air mélancolique, le visage à peine éclairé par la flamme chancelante d’une bougie, le corps emmitouflé dans une épaisse couverture en laine autrichienne et soie indienne…

Alors qu’une larme coulait sur ma joue et que mon chat s’enroulait dans mes jambes en ronronnant…

Alors que je me demandais si mon amant de Saint Jean survivrait à cette guerre horrible, s’il ne souffrait pas trop du froid, là-bas, dans ces tranchées inondées, avec pour seule compagnie un rat affamé et une vieille photo jaunie de nos fiançailles…

Alors que trois malheureux flocons de derrière les fagots daignaient tomber sur l’Anjou, je me surpris à imaginer de quel pays merveilleux pouvaient venir ces petites étoiles orphelines… Là-haut, dans leur contrée d’origine, qui ose jeter par la fenêtre ces petits cotons blancs ?

- Un vieux restaurateur italien qui veut se débarrasser de son stock de parmesan ?

- Un vieux boulanger français qui veut se débarrasser de son stock de farine ?

- Un vieux Dieu esperantais qui veut se débarrasser de son stock d’étoiles ? Pire, le Petit Prince qui veut se débarrasser de son stock d’ampoules…

- Un vieux dealer colombien qui veut se débarrasser de son stock de cocaïne ?

- Un animateur télé qui éternue sur son rail de cocaïne ?

- Un gars aux cheveux gras dont les pellicules tombent en pluie fine sur le sol ? Ou la fabrique de Petrol Hann qui se débarrasse de son stock de pellicules ?

- Un des nains du Père-Noël qui a fait tomber la poubelle de copeaux de bois alors qu’il achevait de confectionner sa millième toupie en bois de la journée ?

- Les bisounours qui font une bataille de coton ?

Alors que la nuit tombait et que ma tisane refroidissait dans sa tasse en porcelaine de Limoges aux jolis motifs fleuris, je sombrais dans un profond sommeil. De petits anges tout vêtus de blanc, qui sentaient bon la vanille, le lait chaud et le Nutella, m’emmenèrent au doux pays des rêves. J’y retrouvais Dorothée et aussi Marie de « La Petite maison dans la prairie ».

Tout était parfait. Les coutures de ma camisole me gênaient à peine.

Et Morphée me laissa sans réponse…



* Sujet du Bac philo 2011