mercredi 12 janvier 2011

Comment dire ? #2

Bonne année mon amour ! Veux-tu m'épouser ?

Chiche qu'il était cap !
"T'auras jamais le courage !" qu'il lui avait dit l'autre zozo.
"T'auras jamais les finances non plus !" qu'il avait surenchérit l'autre blaireau d'à côté.
Ah, ils allaient bien ensemble ces deux là. Deux piliers de bar sans qui le marché de l'alcool en France prendrait une sacrée claque.

De toutes façons, il allait arrêter de venir dans ce bar. ça sentait l'ivrogne, la vieille qui se poudre et les poils de chiens entassés sous les tabourets en skaï. Beurk. Et il ne parlait pas des verres qui, quoiqu'on y verse, sentaient la bière rance.

Chiche qu'il était cap !

Dans Google, il avait tapé "banderole avion" et il était tombé sur ce site qui proposait exactement ce qu'il lui fallait.
Bien sûr qu'il était cap.
Bien sûr, il avait dû rogner un peu sur ses budgets cadeaux.
Il n'y aurait pas de cadeaux cette année. Papy n'aura pas sa bouteille de whisky. Ni mamy sa bouteille d'eau de cologne au chèvrefeuille. Pas grave. Il ferait un dessin avec un petit mot qui leur arracherait une larme. Il parlera de la vieillesse, du temps qui passe, de la famille, de l'héritage et des racines, des souvenirs, de l'odeur de la cuisine et des parties de pêche. Des classiques qui feront passer la pilule.

Bien sûr, le passage à minuit au-dessus de la Tour Eiffel ne serait pas possible.
Bien sûr, imbécile !
Mais la veille, au-dessus du numéro 16 du lotissement des écureuils, pas de problème.
Pas à minuit par contre. 15 heures, ça lui allait ?
Pourvu qu'elle soit dans son jardin. Ou dans sa chambre. Pourvu que le store du velux ne soit pas bloqué. Ou qu'on ne lui propose pas une séance de baby-sitting. Pourvu.
"Qu'est-ce qu'on lui met sur sa banderole au monsieur ?"
"Bonne année mon amour ! Veux-tu m'épouser ?"
C'est trop long ?
C'est trop cher surtout.
"On lui enlève quoi sur sa banderole au monsieur ?"
"Bonne année ?" Ben non.
"Veux-tu m'épouser ?" Ben non.
"Qu'est-ce qu'on fait alors ? Non parce que moi, j'ai des fournisseurs qui attendent."
On n'a qu'à faire "BAMA VTM'EPOUSER ?"

Pourvu qu'elle soit là. Pourvu qu'elle lève les yeux, à 15 heures, vers le ciel au-dessus du numéro 16 du lotissement des écureuils. Pourvu qu'elle comprenne. Pourvu qu'elle pleure, qu'elle comprenne, qu'elle crie "oui", qu'elle comprenne vraiment, qu'elle l'appelle, qu'elle ne se trompe pas. Il aurait dû signer, vous croyez ? Pourvu qu'elle soit là. Il aurait dû signer. Il aurait dû. Peut-être. Mais c'était clair, non. "Mon Amour". Un amour, on n'en a qu'un, il avait pensé. Elle devrait comprendre, à 15h, au-dessus du numéro 16 du lotissement des écureuils.

5 commentaires:

  1. Franchement, tu as vraiment un don pour la narration, c'est un plaisir de te lire. Mais surtout on veut savoir la suite : alors? elle l'a vu? elle a pas vu? elle a dit oui?

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  2. Super une nouvelle nouvelle de Rélie à déguster comme une gourmandise ! Mmmmmh
    Elle est drôlement jolie en plus !
    Merci :-)

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  3. D'accord avec vous, c'est génial et je voudrais bien moi aussi connaître la suite!

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  4. Merci beaucoup beaucoup les filles. ça me touche !

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  5. Moi je n'ai pas forcément envie de savoir.
    j'aime beaucoup aussi laisser mon imaginaire prendre la suite de ton récit. Super super

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